THANH TAM TUYEN
La poésie entre la guerre et le camp
Poète majeur
de la littérature vietnamienne moderne, Thanh Tam Tuyen a apporté une
double contribution originale à la vie littéraire après 1945. En
poésie, il marque la rupture avec l'ancienne tradition de la musicalité
poétique et représente dans ce domaine la génération des poètes du
mouvement Tho tu do (poésie en vers libres). Ses deux premiers recueils
de poèmes : Je ne suis plus solitaire et Lien, la nuit et le soleil
retrouvé ont donné naissance à une génération qui « fait de la poésie »
et « ne fait plus des vers ».
En prose, son
premier récit Foyer du feu marquait aussi un point de non-retour par
rapport à l'ancienne technique de narration. Chez Thanh Tarn Tuyen, la
concision du message contribue à l'accélération des rythmes et à la
maîtrise du sens esthétique.
Reconnu mais
peu étudié en profondeur par la critique durant la guerre de 1954-1975,
il reste à l'heure actuelle l'auteur le plus redoutable de la critique
littéraire vietnamienne, par sa démarche créative complexe et par sa
théorie littéraire synthétique. Tout cela sur fond d'une invention
nouvelle de la musicalité poétique.
Thanh Tam
Tuyen fait partie des écrivains qui ont le mieux saisi la destruction
du Vietnam par les guerres mais il est aussi un des ceux qui ont connu
la répression du régime totalitaire actuel, qui ont vécu
l'emprisonnement, les camps de rééducation pendant de longues années
sous la répression du nouveau régime entre 1975 et 1990. Il évoque ici
ce que fut son expérience de l'écriture sous la répression.
Quelle a été
votre expérience littéraire durant la guerre de 1954 à 1975 ?
Hormis la
poésie, j'ai eu deux périodes marquées par mes deux livres en prose. Le
premier, Bêp lua (Foyer du feu, 1954) décrit l'ambiance de Hanoi avant
1954, où ceux qui partent comme ceux qui restent sont contraints à des
choix forcés, la séparation ou la mort. La réaction de la critique des
écrivains révolutionnaires fut immédiate. Dans un compte rendu de Van
Nghê (Littérature et Art), un critique m'a demandé : « Pendant que le
peuple du nord du pays est en train de livrer toutes ses forces pour
construire le socialisme, ou va le personnage du Foyer de feu ? » J'ai
répondu : « II va vers la destruction de l'histoire », chaque écrivain
est un survivant.
Mon deuxième
livre, Ung Thu (Cancer, 1970) peut être considéré comme le prolongement
de Foyer de feu. Le Cancer est l'existence de notre acceptation entre
la vanité et la tiédeur de la mort. Ce livre n'a jamais été publié.
En 1974, à un
ami à l'étranger qui me demandait : « Pourquoi descendre de la montagne
? » (c'est-à-dire pourquoi exposer sa vie au cœur des événements), j'ai
répondu :
...Je me
rappelle que je ne me souviens de rien
comme un arbre
liquide ses feuilles à la saison de la vieillesse
comme un bout
de bois lourd au gré de la course de l'eau
flotte et
rejoint la plaine
comme les
roseaux sur les rives
avec leurs
cheveux blancs lâchés emmenés par le ciel
Face aux
désordres et à la confusion du temps après 1975, j'ai pensé avoir déjà
vécu toute ma vie, le temps qui me restait était quelque chose en trop,
je ne me donnais plus la peine d'y penser. La désillusion était totale.
En 1975, le nouveau régime m'envoyait en camp de rééducation avec mes
amis « de la même fête et dans le même bateau », nous quittions la
plaine pour les monts avec calme et indifférence, sans désespoir et
sans espoir.
J'ai pensé «
disparaître » sans espoir de retour, pourquoi pas comme le déchet
emporté par l'inondation de l'histoire. Mais je me trompais. On
m'envoyait vers le nord, dans les forêts de haute montagne isolées du
monde extérieur, on me lâchait dans la nature, la « liberté » va avec «
l'objectif sur le bois coupé par jour », je m'entraînais à monter et
descendre en glissant avec l'opportunité de m'évadcr. Mais chaque jour
je retrouvais le chemin de retour au camp.
Qu'est-ce qui
m'appelait à y retourner ? Est-ce le « rien de l'espoir », ou est-ce la
désillusion de l'homme abandonné, de l'homme désespéré ? J'étais
vraiment à ce moment-là dans l'espoir de l'inexistence, dans une zone
impénétrable, dans l'état de non-relation. Ce n'est pas clair pour moi.
Pourtant j'étais persuadé que j'étais ressuscité, c'est-à-dire que la
poésie revenait, j'en étais heureux. J'étais même timide comme lorsque
j'étais jeune, avec mes premiers poèmes, je les cachais à mes amis au
camp, je n'osais pas les montrer.
Quand vous
vivez indifféremment jour après jour, sans penser à l'avenir, sans vous
souvenir du passé, sans aucun souci du présent, que vous reste-t-il ?
Il vous reste ce qui existe déjà en vous, dans vous, et cette chose-là
existe malgré votre volonté.
Pour traverser
ces jours de ténèbres, de pluie, de canicule, de gel, de tempête, de
saisons, je cherchais le plaisir dans cette chose-là, en moi, elle
était la seule que j'emmenais, qui était toujours dans mon corps.
En moi que
restait-il ? La famille, les amis. Les poèmes, bien sûr, lus et
intériorisés. Le moment venu, la mémoire se mobilisait vite, elle les
lisait pour moi seul. Là-bas, souvent, vous pouviez rencontrer des
lumières étranges. Le temps des ruines renforce la poésie.
A tremper dans
le temps « sans histoire » ou plutôt sans l'histoire de l'extérieur, on
découvre que les jours, les mois dans la vie sont sans direction, sans
but, nus. Absolument nus. L'inexistence de la vie donne la paix
intérieure. Cet état poétique paisible règne sur le calme de l'univers.
De là, chaque
poème est un temps clos, détaché du mouvement de la vie. Le temps
soudain de l'angoisse devenait le temps condensé, il n'y a pas de
différence entre la suspension et l'envol.
Or, faire de
la poésie dans un camp de redressement, c'est aussi retourner à la
poésie de tradition populaire. Le régime du travail dans les camps,
c'est une journée intensive de huit heures, sans week-end ; chaque
prisonnier a son univers : une natte ; quelque cinquante ou soixante
prisonniers sur deux étages, tous sous une toile de plus de cent
personnes. L'écriture est un luxe : une place assise, le temps
d'écrire. Avec les cadences imposées aux prisonniers, le froid, la
faim..., qui oserait penser à la création ?
Même un génie,
une force surnaturelle ne pourrait dépasser ces « contraintes ».
Pourtant en
vietnamien, on dit « faire de la poésie » (lam tho), personne ne dit «
écrire de la poésie ». Donc, on peut faire de la poésie partout, dans
n'importe quelle position : en marchant, debout, couclié, assis,
éveillé... La poésie vous rejoint sans rendez-vous, sans fixer le jour,
ni l'heure. On ne peut la chercher parce que l'on ne sait pas ou elle
est. Il ne vous reste qu'un travail simple ; l'accueillir et discuter
avec elle. Elle vous demande une seule chose : garder votre parole pure
et plus tard cette parole décidera de sa propre vie.
Elle est
souvent discrète, elle entre parfois par la porte centrale, parfois par
le petit chemin, soyez a l'écoute, attentif. Elle aime bien se masquer,
se voiler, alors si votre mémoire n'est pas en éveil, vous ne pouvez
l'identifier.
Pendant votre
« travail pour l'objectif révolutionnaire », elle arrive. Soudainement,
en plein champ, en pleine forêt... Elle arrive, elle vous recommande de
vous arrêter. Vous commencez à voir le ciel et à oublier les mouvements
mécaniques. Elle vous emmène aussitôt vers l'état de l'âge intérieur,
paisible. Cette autoexistence donne la joie. Parce que lorsque la
poésie vous lâche, après votre retour dans cette vie que vous avez osé
quitter, vous voyez que cette vie-là se transformera en rythme de vos
vers. Ce qui fait que l'on travaille avec les bras, pendant que les
oreilles courent après les rythmes, la musique du poème. Cette harmonie
donnera l'équilibre nécessaire entre le travail qui se limite aux
gestes et la mémoire qui stocke.
Mais
concrètement la difficulté de faire la poésie dans les camps demeure.
Car il est impossible de rédiger les poèmes, ce qui pourtant est l'état
final de la création : la joie de lire à haute voix et de partager avec
vos proches. La poésie doit être lue et écoutée, tel est son destin
final. Destin d'une parole mais aussi destin de la mémoire de plusieurs
personnes.
Après ma
libération, sur le chemin du retour, la première chose que j'ai faite,
a été de me replier et écrire mes poèmes mémorisés tout au long de ma
détention.
Je suis un
survivant, mais je ne veux plus être écrivain, comme je l'ai pourtant
souhaité depuis toujours.
J'ai écrit
dans ma mémoire au camp : « II faut que j'arrive à écrire comme si rien
ne s'était passe, comme si rien n'était modifié. »
Et maintenant
je me dis : « Quand serai-je capable d'une telle chose ? » Pour
re-écrire.
Khi ra khỏi
trại tù, trên đường về, điều đầu tiên tôi làm, là cúi gập mình viết ra
những bài thơ lưu giữ trong trí nhớ suốt thời gian tù đầy.
Tôi là kẻ sống
sót, nhưng tôi chẳng muốn làm nhà văn nữa, như đã từng mong muốn.
Tôi đã từng
lưu vào trí nhớ, khi ở trong trại tù, điều này: "Phải làm sao viết như
chẳng có gì xẩy ra, chẳng có gì thay đổi."
Và bây giờ tôi
tự hỏi: "Khi nào thì tôi có thể làm được như vậy? Lại viết?
Propos
recueillis et traduits par Le Huu Khoa
Note: Bài
phỏng vấn này, Gấu được bạn Ngô Thế Vinh gửi cho, khi vừa ra ngoài này
ít lâu, chừng 1996-97.
Sau qua Paris,
1999, được Kiệt Tấn cho cả toàn tập, bản copy từ bản của Le Huu Khoa
tặng ông.
Gấu đã từng
nói chuyện với nhà thơ về bài phỏng vấn trên. Cái tít Thơ giữa chiến
tranh và trại tù, như thế, ông đã từng biết.
Không hiểu cái
tít KINH NGHIỆM SÁNG TÁC TRONG TÙ ông
cũng đã từng biết?
Larmes les
cailloux verts
Je sais qu'il
existe des gens qui pleurent seuls
sans s'arrêter
une seule minute
ces gens
pleurent mais leurs larmes
ne quittent
pas leurs cœurs
connais-tu ces
larmes
ce sont les
cailloux verts
Lệ đá xanh
Tôi biết những người khóc lẻ loi
không nguôi một phút
những người khóc lệ không rơi ngoài tim mình
em biết không
lệ là những viên đá xanh
tim rũ rượi
(...)
Le soleil
cristal
Nắng thuỷ tinh
[Phục sinh]
(...)
J'ai envie de
pleurer comme
j'ai envie de
vomir
dehors
le soleil est
cristal
j'invoque mon
nom pour barrer la tristesse
je crie mon
nom pour barrer la colère
j'ai envie de
vivre autant que de mourir
(...)
Les nuits
Đêm
(...)
Les nuits les
guerres s'oublient
les yeux noirs
de silence
j'arpente la
ville en trêve
la solitude
n'est pas encore brûlée par le soleil
elle
s'accommode d'un froid mort
(...)
Les poteaux
électriques
Cột điện [Dạ
khúc]
(...)
J'ai peur que
les poteaux électriques ne tombent
que les fils
électriques ne s'enroulent
et n'étouffent
à mort nos espoirs
viens je
t'emmène
on s'en va
suis-moi dans le parc
je ne suis
qu'un fou
je te serre
dans mes bras
or je pense
déjà à toi les jours qui viennent
(...)
Thanh Tam Tuyen
Traduit par Le
Huu Khoa
La Part d'Exile
Thanh Tâm Tuyền
Thơ giữa chiến
tranh và trại tù.
Nhà thơ chủ
yếu của văn học Việt Nam hiện đại, Thanh Tâm Tuyền đã hai lần đóng góp,
và đóng góp nào cũng mang tính uyên nguyên, cho cuộc sống văn học sau
1945.
Về thơ, ông
cắt đứt truyền thống cổ điển về nhạc tính trong thơ, và trong mảnh đất
mới mẻ này, ông là người đại diện của nó: người sáng lập ra trường phái
thơ tự do. Hai tập thơ đầu 'Tôi Không Còn Cô Độc' và 'Liên Đêm Mặt Trời
Tìm Thấy' khai sinh ra một thế hệ "làm thơ", "không làm những câu thơ".
Về văn xuôi,
truyện kể đầu tay, Bếp Lửa, cũng đánh dấu sự không thể trở lại với cách
kể chuyện cũ nữa. Tính ngắn gọn của thông điệp làm tăng nhịp văn và làm
chủ cảm quan thẩm mỹ.
Được nhìn
nhận, nhưng không được nghiên cứu sâu, bởi giới phê bình trong thời kỳ
chiến tranh 1954-1975, tuy nhiên, vào lúc này, ông quả là một tác giả
đáng gờm của giới phê bình văn học Việt Nam, bởi tính đa dạng trong
đường hướng sáng tạo, và bởi lý thuyết văn học mang tính tổng hợp. Tất
cả điều này sở dĩ có được, là nhờ dựa trên một phát kiến mới mẻ của ông
về nhạc tính của thơ.
Thanh Tâm
Tuyền thuộc trong số những nhà văn sớm cảm nhận sự huỷ hoại của đất
nước Việt Nam chiến tranh triền miên nhưng ông cũng là một trong số
những người hiểu thế nào là sống trong một chế độ toàn trị kìm kẹp như
chế độ hiện thời, trải qua tù đầy, trại cải tạo, trong nhiều năm ròng
rã, dưới sự áp bức của chế độ mới, từ năm 1975 tới 1990. Ông kể lại sau
đây, kinh nghiệm viết của ông, dưới áp bức, kìm kẹp.
Kinh nghiệm
văn chương của ông trong thời kỳ chiến tranh từ 1954 tới 1975?
Ngoài thơ ra,
tôi trải qua hai giai đoạn đánh dấu bằng hai tác phẩm văn xuôi. Cuốn
đầu, Bếp Lửa, 1954, miêu tả không khí Hà-nội trước 1954; đi và ở đều là
những chọn lựa miễn cưỡng, chia lìa hoặc cái chết. Lập tức có phản ứng
của những nhà văn cách mạng. Trong một bài điểm sách trên Văn Nghệ, một
nhà phê bình hỏi tôi: "Trong khi nhân dân miền Bắc đất nước ra công xây
dựng xã hội chủ nghĩa, nhân vật trong Bếp Lửa đi đâu?". Tôi trả lời:
"Anh ta đi đến sự huỷ diệt của lịch sử," mỗi nhà văn là một kẻ sống
sót.
Tác phẩm thứ
nhì của tôi, Ung Thư (1970) có thể coi như tiếp nối Bếp Lửa. Ung Thư là
chấp nhận giữa vô thường và chút hơi ấm của nỗi chết Cuốn sách chẳng
bao giờ được in ra.
Vào năm 1974
một người bạn ở hải ngoại hỏi tôi: "Tại sao xuống núi ?" (nghĩa là tại
sao phơi đời mình ra giữa những biến động? ), tôi đã trả lời:
... Tôi nhớ là
chẳng nhớ gì
như cây kia
trút lá mùa già
như khúc củi
nặng nề trôi theo giòng nước xuống tới đồng bằng
Nguồn
Thơ giữa Chiến Tranh và Trại Tù