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Tẩu khúc của thần chết (1)
par Linda Lê
(1) Nhan đề một bài thơ của Paul Celan. Coi:
Mẹ có đau khổ không như Mẹ đã từng đau khổ?

Cuốn phim của Marc Rothemund, Sophie Scholl, Những ngày cuối cùng, đã thành công trong việc làm tái sinh một nàng Antigone, cùng với người anh của nàng, thành lập nhóm Hồng Trắng, La Rose Blanche, người tin tưởng vào sức mạnh của chữ viết, khí giới bí mật chống lại sự man rợ của chủ nghĩa Hitler. Chính trong tác phẩm của Ernst Wiechert, một du kích đã chọn lựa ở lại Đức, trong thời kỳ Nazi, mà nàng [Antigone] đã dấn thân hết mình vào công cuộc chống lại "những bộ máy đè bẹp nhân loại" ["les machines à écraser l'humanité"], (chữ của Simone Weil, một khuôn mặt sáng ngời khác nữa, của lực lượng Kháng Chiến).
Missa sine nomine, di chúc tâm linh của Ernst Wiechert, xuất bản năm 1950 - tác giả trốn thoát Buchenwald, qua Thuỵ sĩ sống từ năm 1948, vừa mới mất, thọ 63 tuổi - là một cuốn tiểu thuyết của một nhà nhân bản, người, đã đứng ở "cửa Địa Ngục", tự hỏi, liệu LỜI [le Verbe] có còn là khởi đầu của tất cả....

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                   par Linda Le

      FUGUE DE MORT
le testament spirituel d'Ernst Wiechert, rescapé de Buchenwald

Le film de Marc Rothemund, Sophie Scholl, Les Derniers jours, avait réussi, en 2005, à ressusciter cette Antigone qui, tout comme son frère, fondateur du groupe La Rose blanche, croyait à la puissance de l'écrit, arme secrete employée pour s'opposer à la barbarie hitlérienne. C'est dans l'œuvre d'Ernst Wiechert, maquisard ayant choisi de rester en Allemagne pendant le nazisme, qu'elle puisa la volonté de se dresser contre ces « machines à écraser l'humanité » (l'expression est de Simone Weil, autre figure lumineuse de la Résistance).
  Missa sine nomine, testament spirituel d'Ernst Wiechert, publié en 1950 - rescapé de Buchenwald et installé en Suisse depuis 1948, il venait de mourir à l'âge de 63 ans -, est le roman d'un humaniste qui, pour s'être trouvé « aux portes de l'enfer », se demande si le Verbe peut encore être au commencement de tout, si les « découragés » ont raison d'espérer une « merveilleuse transformation » de leur cœur à l'écoute de l'ultime mélodie de Mozart, si le conteur n'est pas impudent quand il excipe de l'universalité pour vanter sa « marchandise ».
  Dans sa préface à cette chronique d'une désespérance surmontée, Pierre-Emmanuel Dauzat, esprit hétérodoxe auquel nous devons des essais brillants et dérangeants sur le christianisme et sur la representation de l'Holocauste, rappelle que, surveillé par les sbires de Goebbels et regardé avec suspicion par ses pairs exilés, Thomas Mann notamment, Wiechert avait, en 1939, au cours de son « émigration intérieure », enterré sous quelque arbre de son jardin un témoignage, Le Bois des morts, où il dénonçait les camps d'extermination. « II faut que je lui dise que j'ai vu mourir des milliers d'hommes, sans bouger le petit doigt. Qu'il ne faut plus demander : "Abel, qu'as-tu fait de ton frère?" Car les frères ont été millions », soupire Amédée, le protagoniste de Missa sine nomine, sorti anéanti de la « fosse aux bêtes » et incapable, même au milieu de ses proches, de renouer avec la sérénité.
  Ernst Wiechert, qui avait, dans La Commandante (éd. Calmann-Lévy, 1963), mis en scène une sorte de Colonel Chabert, revenu d'une captivité en Afrique et tentant d'enterrer son passé, décrit ici le difficile retour à la vie d'un enfant du siècle de fer. Il a dû apprendre à lire l'alphabet de l'abjection dans les pages arrachées au Livre de Satan, il a assisté à la  métamorphose de son semblable en assassin, « assassin par jeu ». Face à l'innommable, écrire sur la culpabilité et l'expiation a-t-il encore un sens ? La réponse avait déjà été donnée par le messager du Bois des morts: « Ma voix a été appelée, et elle raconte. » Leçon de ténèbres, Missa sine nomine, conçue presque au même moment que le poème de Paul Celan sur la mort, « ce maître d'Allemagne » qui lance ses grands chiens sur les hommes et leur offer une « tombe dans le ciel », est un splendide défi aux forces caïnites.
Traduit de l'allemand par Jacques Martin
Préface de Pierre-Emmanuel Dauzat
Éd. du Rocher, « Motifs », 532 p., 10 €.