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Tin Văn sẽ chuyển ngữ bài phỏng vấn đặc biệt dành cho tờ Lire, Đọc, "Tôi viết Những đứa con sinh ra vào lúc nửa đêm như thế nào",của Rushdie, nhân cuốn sách được "thêm" giải thưởng "Bảnh nhất trong những Booker" Cuốn này sẽ có bản tiếng Việt very soon! NQT

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LIRE OCTOBRE 2008
Comment j'ai écrit Les enfants de minuit
par Salman Rushdie
Les enfants de minuit de Salman Rushdie, récompensés par le Booleer Prize en 1981, viennent d'être élus « The Best of the Booleer » pour le 40e anniversaire du prix. L'auteur revient sur la genèse de cette œuvre. En exclusivité, Lire vous en propose la traduction.
Un jour de 1976 - lequel, je ne me rappelle plus exactement-, un jeune auteur qui se débattait avec une histoire aussi énorme que rétive décida de tout recommencer à zéro, en laisssant son narrateur s'exprimer à la première personne. C'est ce jour que fut écrit l'essentiel de l'ouverture des Enfants de minuit  *. « Il était une fois ... je naquis à Bombay» ; «Les bras de la pendule ont joint les mains pour m'accueillir avec respect»; « enchaîné à l'histoire »; « Morve-au-Nez, Bouille-Sale, Déplumé, Renifleux, Bouddha et même Quartier-de-Lune ». Je me souviens encore du sentiment d'exaltation qui me submergea quand je découvris la voix de Saleem Sinai ainsi que la mienne par la même occcasion. Rétrospectivement, j'ai toujours pensé que c'est ce jour que je devins enfin écrivain, après dix ans de tâtonnements. Telle fut donc « ma naissance, placée sous l'empire des pendules et entachée de crime ».
A la fin de l'année 1979, j'avais terminé le manuscrit et le livre avait des éditeurs, les meilleurs de l'époque: Jonathan Cape à Londres et Alfred Knopf à New York. Leur soutien m'encouragea à penser que j'avais peut-être enfin réussi à écrire un bon livre; mais après tant et tant d'années d'errements, j'étais encore rongé de doutes. Je parvins à mettre ces doutes de côté et je me lançai dans l'écriture d'un autre roman - Shame («La honte ») - ce dont je remercie le Ciel car, tandis que Les enfants de minuit rencontraient un extraordinaire succès, je n'eus pas à me demander que faire après. Ayant déjà rédigé une première mouture de Shame, j'avais conscience d'avoir encore pas mal de travail à abattre quand arriva la soirée de remise du Booker Prize.
La publication des Enfants de minuit fut longtemps retardée par toute une série de malheureux contretemps. Cape et Knopf avaient convenu d'imprimer les éditions anglaise et américaine aux Etats-Unis afm d'en réduire les coûts de fabrication quand survint la grève des imprimeurs. Quand elle se temlina et que le livre fut imprimé, une grève des transporteurs retarda l'envoi des exemplaires vers Londres. Quand ceux-ci arrivèrent enfin, une grève des dockers en empêcha le déchargement. La sortie du livre fut donc repoussée plusieurs fois tandis que je me rongeais les onngles. J'avais aussi d'autres soucis. Je n'aimais pas la jaquette de l'édition Knopf, avec son rose saumon pas frais - un saumon [salmon en anglais] qui fera touujours pour moi fâcheusement écho à Salman. Je ne raffolais pas non plus de la couverture de l'édition Cape; mais lorsque je demandai timidement à voir autre chose, on me conseilla avec hauuteur d'y renoncer pour ne pas retarder encore plus la sortie de l'ouvrage. (Depuis, les éditeurs se montrent un peu plus réceptifs à mes suggestions.) Evidemment, tous ces contretemps et autres anicroches antérieurs à la publication semblaient annoncer une immanquable catastrophe.
La meilleure surprise : l'accueil recu en Inde.
Cette catastrophe n'eut pas lieu. Quand je repense aux merveilleuses heures de ce premier succès, je revois d'abord le déjeuner chez Bertorelli, le restaurant de Charlotte Street où ma directrice de collection, Liz Calder, la première lectrice du livre, Susannah Clapp, quelques amis et moi-même avons fêté le bon accueil réservé au livre par la critique; puis l'instant où, avant que je n'entre assister au dîner de remise du Booker Prize au Stationer's Hall, Carmen Callil (qui dirigeait alors Virago) m'affirma que j'allais remporter le prix, pronostic qui, entre ma nervosité et mon vieux fond de superstition, me persuada immédiateement que je ne l'aurais pas. Curieusement, je ne me souviens guère des critiques annglaises. En revanche, il y en eut trois que je n'ai jamais oubliées: celle d'Anita Desai dans le Washington Post, de Clark Blaise dans le New York Times et de Robert Towers dans  la New York Review of Books. Il y en eut aussi une autre, mémorable car meurtrière. L'émission Kaleidoscope de la BBC avait consacré pas mal de temps à mon roman, sortant même le grand jeu : musique indienne en prélude, lecture d'un extrait, sympathique interview de l'auteur, avant de laisser la parole à un critique ... qui avait exécré le livre. Le présentateur de l'émission, Sheridan Morley, ne cessait de demander à ce critique (dont le nom m'échappe) s'il n'y aurait toutefois pas dans l'ouvrage ne serait-ce qu'un petit aspect sauvable à ses yeux. « Mais ne pensez-vous pas que ... », « Convenez néanmoins que ... », etc. Hélas, le critique était implacable. Il avait détesté le livre de bout en bout. Le contraste entre une ouverture si grandiose et tant d'intransigeance agressive produisait un effet grotesquement risible.
Avec Les enfants de minuit, livre régulièrement scandé d'images de réappropriation d'un territoire (car Bombay est bâtie sur des terres gagnées sur les eaux), je tentais moi-même de me réapproprier mes origines et mon héritage culturel indiens, depuis mon nid d'aigle de Kentish Town. Aussi, la meilleure chose qui soit arrivée à ce livre et à son auteur fut l'accueil qu'il reçut en Inde, où les gens se montrèrent infiniment moins sensibles à sa magie qu'à son réalisme, où nombre de lecteurs (tout comme l'auteur) entendirent à travers la voix de Saleem l'écho de la leur, où les éditions pirates furent si nombreuses et si rentables que des pirates anonymes commencèrent même à m'ennvoyer des cartes de vœux, du genre: « Bon anniversaire, signé: les Pirates» , « Tous nos vœux de bonne et heureuse année, les Pirates ». Ce furent peut-être là les compliments suprêmes.
Au fil du temps vinrent aussi quelques tentatives révisionnnistes. Des critiques tels que D. J. Taylor en Angleterre et Amit Chaudhuri en Inde ont déploré l'influence « presque entièrement nuisible » que produisit ce livre (selon Taylor), qui accumule (pour Chaudhuri) « tout ce que l'Inde a de plus superficiel- son côté criard, son appparent manque de goût pour l'introspecction et l'ironie, ainsi que sa propension à malmener la grammaire anglaise ». Personnellement, cela ne me soucie guère. Car je me souviens du jour où jaillit de moi la voix de Saleem, de la joie et du sentiment de libération que j'éprouvai alors et je suis fier que cette voix jeune ait pu aussitôt attirer - et attire encore - tant de jeunes lecteurs. Je me dis qu'en définitive, c'est cela qui compte.
Citations tirées de la traduction française des Enfants de Minuit due à Jean Guiloineau (Stock). ©Guardian, 2008
(Article traduit de l'anglais par Sylvie Dumstanti.)