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James Ellroy, le justicier magnifique

par Violaine Binet

VOGUE

" Hello.» Une voix caverneuse traverse l'Océan. James Ellroy répond au téléphone depuis Los Angeles. La ville où il nait, l'année 1948, où se déroulent tous ses romans. La série du «L.A. Quartet», don’t l'inoubliable Dahlia noir, Le Grand Nulle part, L.A. Confidential, White Jazz; la trilogie «Underworld USA», avec des titres aussi marquants qu’Américain Tabloid; et encore ses mémoires, Ma part d'ombre, ou La Malédiction Hilliker, sorti en 2011. Style, humour, intensité dramatique, émotion, Ellroy a lifté les canons du roman noir jusqu'à la garde. Obsession est le mot de son oeuvre. «Cherchcz la femme», dit-il souvent. Ce géant d'1,95 mètre a été un enfant fracassé à 10 ans par le meurtre de sa mère. Geneva Hilliker Ellroy, présentc dans chacun de ses grands romans, est sans doute le fil conducteur. On n'en parlera pas. Trop évident. C'cst en France que parait en avant-première ce mois-ci Extorsion, une longuc nouvelle jubilatoire lustrant quelques-uns de ses thèmes fétiches - l'appétit voyeuriste américain, la collision de la pègre avec Hollywood. Elle est accompagnée d'extraits de Perfidia, premier volume d'une nouvelle fresque titanesque dont la publication va démarrer en 2015. II est 13 heures à L.A., 22 heures à Paris. Le king du polar parle en détachant ses mots et en mettant le ton. On croit entendre le DJ d'une émission nocturne. Pas de quoi avoir des sueurs froides. C'est juste un one-man show très cool, enveloppé par la nuit.

Quel a été le point de départ d'Extorsion ?

JAMES ELLROY: Mon éditrice américaine m'a demandé d'écrire un livre court, une longue nouvelle, pour elle. Bien sur j'ai dit. Aux États-Unis, elle est sortie en e-book. C'est la première fois qu'elle est imprimée, en francais, C'est une «novella» comiquc inspirée du point de vue et de la vie réelle d'un détective privé nommé Fred Otash, qui fournissait des histoires au magazine Confidential dans les années 50.

Fred Otasli apparaissait déjà, dans deux de vos romans.Pourquoi êtes-vous si enthousiaste à son sujet ?

J'ai connu Freddy très brièvement les dernièrcs années de sa vie. C'était un méchant attachant. Je lui ai fait commettre autrefois et dans ce livre des turpitudes qu'il a vraiment faites. Et d'autres qu'il n'a pas faites. J'ai pensé que sa voix exprimerait bien, une nouvelle fois, mon penchant pour la loi américaine déréglée des années 50, dans un registre burlesque.
Vous avez du vous amuser en écrivant. Beaucoup. Passer du temps dans cettc période de délation, de scandales, truffée de stars du cinéma s'envoyant en l'air et s'attirant des ennuis est toujours synonyme d'excellents moments. Ces sentiments, ces événements traversent mes livres depuis des années.

Fred Otash déballe sur un paquet de célébrités. On croise ici Marilyn Monroe et John Kennedy bien sur, mais aussi Ingrid Bergman insatisfaite des prestations du president, Liz Taylor dans un trio échangiste, Burt Lancaster en sadique, John Wayne
en drag queen, etc. Où est le vrai, où est le faux ?

Je ne réponds jamais à cette question. Certaines des choses que je dis à propos des célébrités sont avérées, d'autres relèvent de la fiction. Ce que j'essaie de faire, c’est de créer une apparence qui sonne juste, de sorte que vous, lectrice, soyez amenée à vous interroger sur la vérité de tout ca. Il est temps de le dire, l'histoire se passe au purgatoire. Freddy doit passer à confesse dans l'attente d'aller en enfer, ou au paradis. Et c'est vous, James Ellroy, qui jouez le role du confesseur. Quel est
le sens de la métaphore ? Fred Otash est l'auteur d'ignobles méfaits. II merite d'être puni. Je crois en ces choses. Je crois qu'on doit se conduire convenablement lors de notre séjour sur terre. Je crois en Dieu. Personnellement, je n'agirais pas comme Fred Otash l'a fait. Et au final je m’arnuse à ses dépens.

Son péché principal est-il de n’aimer personne? Je ne vois pas qui pourrait l’inspirer, remarquez. Il est entouré d'un gang de femmes dépravées.

La nouvelle pour moi est toujours satirique. Et la place manque pour développer une grande histoire d'amour. Je n'ai pas pu étoffer le personnage de Fred Otash au point où il aurait été capable de tomber amoureux d'une femme. Rassurez-vous, j'ai une superbe héroine feminine à venir dans Perfidia. Le style est ici particulièrement savoureux: Une fille gaulée comme une gargouille, un lit qui est un terrain d'atterrissage. Comment faites-vous ces trouvailles ?
J'adore les allitérations. J'adore les invectives racistes, le parler sifflant de chat en colère, l’argot, le slang noir . J'adore la profanation en géneral. Et j'adore l'aspect outrancier de l'idiome américain.

(Suite page 249)

"Je ne lis plus dorénavant, C'est dans mon sang. On n'apprend pas le gout du sang à un tigre. Le tigre a faim, il a besoin de viande. C'est moi le tigre. Je suis le tigre du roman noir.”
Tôi đ
ếch đc na. Có sn trong máu. Ngưi ta đâu dy h mùi máu. Nó đói, nó cn tht sng. T là con h đó. T là con h ca tiu thuyết đen.